samedi 28 juin 2025

Liane Moriarty - Ici et maintenant

 

Auteur : Liane Moriarty
Lecteurs : 
Cachou Kirsch
Éditeur : Audiolib
Parution : 16 avril 2025
Durée : 16 h 04 min
EAN-13 : 979-1035416935


Les passagers du vol Hobart-Sydney patientent à bord de l'avion dans l'attente du décollage. Parmi eux, une mère dépassée par ses deux enfants, de jeunes mariés en lune de miel, un père de famille qui rentre chez lui, un homme en deuil, une infirmière proche de la retraite, une hôtesse de l'air qui fête son anniversaire. Des étrangers destinés à ne jamais se revoir.

Mais voici que, tout à coup, une petite femme discrète aux cheveux gris se lève de son siège et s'adresse à chacun d'eux pour leur annoncer la date et les circonstances exactes de leur mort.

Qui est-elle ? Une véritable voyante ou une folle ? Pour nos voyageurs, une chose est sûre : la vie ne sera plus jamais comme avant.



Je continue mon exploration du livre audio avec, cette fois-ci, le dernier roman de Liane Moriarty. Je connaissais sa plume à travers son roman Un peu, beaucoup, à la folie.
Je remercie les éditions Audiolib de m'avoir permis cette écoute.

Dès les premières minutes, l'autrice frappe fort avec une scène d'ouverture singulière : une femme se lève dans un avion et révèle à chaque passager la date et la manière dont il va mourir. On croirait presque à un pitch de série télé, mais Liane Moriarty le traite à sa façon : sans effet de manche, sans drame exagéré, presque avec discrétion. C'est précisément là que réside à la fois la force et la fragilité du roman. Ce n'est pas un thriller, ni une œuvre de science-fiction ou de fantasy. C'est un récit choral, humain, où la question de la mort agit comme un révélateur de nos déséquilibres intimes.
Les passagers, tout à coup confrontés à leur propre fin, deviennent les héros d'une introspection collective. Chacun voit son monde intérieur chavirer. Mais là où on attendrait un basculement brutal, l'autrice préfère la subtilité : elle explore les pensées, les doutes, les réactions minuscules qui font la vérité d'un être humain. Toutefois, cela implique un rythme lent, parfois étiré, qui pourrait en dérouter certains en quête de tension dramatique continue.

Le roman fonctionne en mosaïque. On suit les trajectoires de plusieurs passagers. Chacun réagit à l'annonce selon son vécu, ses blessures, ses peurs.
En revanche, certaines trajectoires restent inégalement développées. Certaines voix sont plus marquantes que d'autres. Certaines histoires se résolvent de façon un peu trop prévisible ou laissent en suspens des questions qu'on aurait aimé voir approfondies.

Le style de Liane Moriarty est fluide et ponctuée d'humour discret. Cela fonctionne très bien en version audio. L'écoute prend une dimension presque philosophique : que fait-on du temps qu'il nous reste ? Est-ce que savoir nous rend plus vivant ? ou plus vulnérable ?

Ce qui peut diviser, c'est l'ambiguïté fondamentale de l'histoire. La mystérieuse femme qui délivre les dates de mort ne sera jamais totalement expliquée. Est-ce une illuminée ? Une prophétesse ? Liane Moriarty ne tranche pas. C'est un choix assumé, qui ouvre la porte à l'interprétation, mais qui laissera peut-être sur leur faim ceux qui espéraient une résolution plus claire.

La fin du roman adopte un ton plus apaisé. Il n'y a pas de dénouement fracassant, mais un apaisement plus ou moins progressif, comme si chaque personnage avait appris à regarder sa vie autrement. Cette fin m'a tout de même un peu frustrée. J'ai trouvé la résolution un peu trop rapide alors que le reste du roman est guidé par une narration plutôt lente.

Au final, Ici et maintenant est un roman ambitieuse dans son intention mais inégal dans sa réalisation. Il séduit par sa construction chorale et son regard tendre sur l'humanité ordinaire. Néanmoins, il laisse une impression de demi-mesure.
C'est un livre que je qualifierais de plaisant, sans être marquant. Une lecture fluide, bien construite, parfois touchante, mais qui, une fois terminée, se dissipe assez vite. Ce fut une parenthèse agréable mais éphémère.

samedi 21 juin 2025

S. F. Williamson - A Language of Dragons

 

 Auteur : S. F. Williamson
Éditeur : Big Bang
Parution : 26 mars 2025
Pages : 448
EAN-13 : 978-2362315305



Il suffit d'une étincelle pour allumer un brasier.

Londres, 1923. Les dragons sillonnent le ciel et dans les rues, le peuple se révolte.

Vivien, elle, reste concentrée : elle veut devenir traductrice de langues draconiques et s'assurer que sa petite soeur n'aura jamais à vivre dans la misère de la troisième classe.

Et pourtant, il ne lui faudra qu'une journée pour déclencher une guerre civile.

Dès lors, elle n'a pas le choix : pour réhabiliter les siens, elle doit travailler pour le gouvernement britannique et tout faire pour décrypter un mystérieux code draconique. Si elle échoue... sa famille mourra. Mais aux côtés des autres jeunes recrutés, et notamment d'Atlas, un garçon aux tendances rebelles issu de la troisième classe, Viv comprend peu à peu que les enjeux du conflit ne sont pas ceux qu'elle pensait.

Quelle guerre est-elle vraiment prête à mener ?



Ce roman a été sélectionné dans le cadre du Bookclub de juin organisé par Charlotte (Chez Cha Cheshire).

A Language of Dragons est porté par un concept original : la langue comme lien entre les humains et les dragons. L'autrice explore la manière dont les langues peuvent être porteuses d'histoire, de culture et d'émotions, mais également de pouvoir. Cette approche donne une vraie profondeur au monde qu'elle crée : les échanges ne sont pas anodins, les traductions sont complexes et chaque nuance linguistique a des conséquences. C'est un hommage subtil à la richesse des langues, à leur fragilité, mais aussi à leur potentiel de connexion entre des êtres radicalement différents.

Malgré un univers bâti autour d'eux, les dragons, censés être au cœur du récit, restent étonnamment en retrait. Leur présence, bien que fascinante sur le plan conceptuel - notamment avec l'idée de l'écholocalisation comme forme de perception et de communication - est trop peu exploitée. Ce potentiel narratif est relégué à l'arrière-plan, alors qu'il aurait mérité d'être pleinement exploré. J'espère que la suite redonnera aux dragons une vraie place au centre de l'intrigue.

En parallèle, le traitement des personnages peine à convaincre. Viv, la protagoniste principale, est particulièrement difficile à apprécier : impulsive, immature, parfois (souvent ?) insupportable. On sent une volonté de la faire évoluer, mais pour l'instant, elle crée une véritable barrière à l'immersion. Les autres personnages sont également esquissés de manière un peu trop superficielle pour pleinement porter l'histoire.

Malgré ces faiblesses, A Language of Dragons propose une approche originale de la fantasy, où les mots ont un vrai pouvoir - symbolique, culturel et narratif.
L'univers, encore en pleine construction, donne envie d'en découvrir davantage.
J'espère que la suite parviendra à mieux équilibrer le potentiel des dragons, le développement linguistique et l'évolution des personnages.

samedi 14 juin 2025

Alain Ayroles, Hervé Tanquerelle et Isabelle Merlet - La Terre verte

Auteur : Alain Ayroles
Dessinateur : Hervé Tanquerelle
Coloriste : Isabelle Merlet
Éditeur : Delcourt
Parution : 9 avril 2025
Pages : 256
EAN-13 : 978-2413076780


Aux derniers temps du Moyen Age, les ultimes descendants des Vikings tentent désespérément de survivre sur les rivages glacés du Groenland. Un homme au lourd passé, en quête d'une seconde chance, débarque parmi eux. Leur apportera-t-il le salut ou précipitera-t-il l'effondrement de la "Terre verte" ?


Je remercie les éditions Delcourt de m'avoir permis de découvrir cet ouvrage via la plateforme NetGalley.

En toute transparence, lorsque j'ai commencé ma lecture, je n'avais plus en tête le résumé de ce récit. On nous propose ici une uchronie réaliste se déroulant dans les paysages glacés du Groenland.
On nous livre une version crédible d'un monde qui aurait pu exister. Tout est plausible, documenté, solidement ancré dans l'histoire. Le travail documentaire est solide, les références historiques et anthropologiques sont bien intégrées sans être pesantes.
L'uchronie sert avant tout de cadre à une réflexion sur le pouvoir, la mémoire et les choix individuels. Richard est présenté comme un personnage ambivalent, entre remords, ambition et résilience.

Graphiquement, une véritable atmosphère est créée : les paysages glacés, les visages burinés, les couleurs discrètes mais efficaces, ... Tout cela renforce la sensation de froid, de tension et d'enfermement.

Malgré cette richesse visuelle et contextuelle, mon ressenti est en demi-teinte.
La figure centrale du récit peine à susciter l'empathie, et ce malgré sa complexité. Il est tout en retenue, ce qui rend difficile l'implication du lecteur. Il en va de même pour plusieurs personnages secondaires : bien caractérisés, mais pas toujours pleinement exploités.
Le récit semble vouloir beaucoup dire - sur le pouvoir, l'exil, la mémoire, la foi, la survie - mais le fil rouge se dilue parfois dans une narration trop cérébrale. On sent la volonté d'intellectualiser, de donner du poids historique et symbolique à chaque dialogue ou confrontation. Malheureusement, cela se fait parfois au détriment de l'émotion ou de la tension dramatique.

La Terre verte est une œuvre ambitieuse. Elle propose une vision originale d'un monde oublié, entre Histoire et fiction. Toutefois, cette ambition freine par moment l'élan narratif. L'album impressionne plus qu'il n'emporte et laisse une sensation de distance : intellectuellement stimulant, mais émotionnellement un peu froid.

samedi 7 juin 2025

Mois de la Fantasy 2025

 

Le mois de mai vient de se terminer et avec lui le challenge Mois de la Fantasy organisé par Stéphanie (alias Pikiti bouquine).

Ce mois est passé très vite.
Le genre SFFF (Science-fiction, Fantastique et Fantasy) est mon genre de prédilection. Néanmoins, je me suis laissée libre de lire ce que je souhaitais : aucune pression.
Afin de valider certaines catégories, j'ai plus axé sur le côté Imaginaire que Fantasy (Est-ce de la triche ? J'assume complétement !).


Pärm correspond plus au mot-clé "Quête" que "Cosy fantasy" évidemment.


Dernier acte des Mémoires de la forêt qui a su toucher mon petit cœur.


Une agréable découverte ! Hâte de connaître la suite !


Je ne sais pas vraiment où classer cet ouvrage graphique. En tout cas, il rentre parfaitement dans la catégorie "Horreur" !


A première vue, U4 est plutôt une série de science-fiction. Toutefois, il y a un élément lié à Koridwen qui, pour moi, relève du fantastique.

J'ai été moins "sérieuse" cette année que les éditions précédentes. Néanmoins, je prends toujours ce challenge sous le signe du plaisir et non sous un aspect de compétition ou de défi. La Fantasy restera de toute façon un de mes genres favoris.
Au final, je ne m'en sors pas si mal que cela, je trouve !

Et vous ? Avez-vous participé ?

mercredi 4 juin 2025

Mickaël Brun-Arnaud et Sanoe - Mémoires de la forêt, Tome 4 : La Saison des adieux

 

Auteur : Mickaël Brun-Arnaud
Dessinateur : Sanoe
Éditeur : Ecole des Loisirs
Parution : 16 octobre 2024
Pages : 328
EAN-13 : 978-2211331852



Autour de la famille Renard, on s'active aux préparatifs de l'anniversaire des quatre-vingts ans de la librairie de Bellécorce quand soudain, une branche craque. C'est le premier signe d'une terrible maladie : le croquebois. Pour en venir à bout, une seule solution : couper l'arbre. Mais, ça, Ernest Renard ne peut s'y résoudre. Le vieux chêne abrite les souvenirs et les oeuvres de sa mère, Anouchka. S'il disparaît, c'est aussi elle qui s'en ira encore un peu plus. À moins que l'arbre des souhaits, un pommier magique dont Anouchka lui avait parlé quand il était petit, n'accomplisse un miracle. Sa quête à travers la forêt lui réservera bien des pépins, et la vie à croquer.


Il est des livres qui referment leurs pages avec la douceur d'une caresse sur l'âme. La Saison des adieux, dernier acte des Mémoires de la forêt en est un.

Le vieux chêne de Bellécorce, rongé par le croquebois. Avec lui, c'est toute la mémoire d'une famille qui menace de disparaître. Mais à l'heure où tout semble décliner, c'est une promesse, nichée dans les mots d'une mère disparue, qui fait germer l'espoir. Commence alors une quête initiatique dans un univers où le passé se conjugue au présent pour mieux ouvrir un avenir apaisé.

Le choix du printemps comme cadre symbolique n'est pas anodin. Le style de l'auteur épouse cette saison : il est limpide, fluide, mais jamais mièvre. Il parle aux enfants avec des mots d'adultes et aux adultes avec une tendresse d'enfance retrouvée.

Ce printemps n'est pas celui du renouveau effervescent, mais celui de la transmission. On y quitte, mais on lègue aussi. Ernest, en partant vers l'arbre des souhaits, n'abandonne rien : il s'assure que ce qui a compté continue de vivre autrement. L'adieu, ici, est moins une fin qu'un passage.

Les illustrations de Sanoe prolongent le souffle du texte. L'écrit et l'image deviennent une fois encore complices.

Ce volume referme les Mémoires de la forêt avec une grande justesse : ni pathos, ni grandiloquence - juste la vérité d'un amour qui persiste, même au-delà de la disparition. C'est un roman qui nous dit doucement que l'adieu n'est jamais tout à fait une fin, mais parfois un début caché. Ce dernier tome n'enseigne pas seulement à se souvenir, mais à aimer sans posséder, à transmettre sans retenir. Un adieu, oui, mais offert à hauteur d'âme.

lundi 2 juin 2025

Rawia Arroum - Pärm

 

Auteur : Rawia Arroum
Éditeur : Scrineo
Parution : 27 février 2025
Pages : 498
EAN-13 : 978-2381672762



Un nouveau virus décime les territoires de Pärm et menace la paix.
Qui survivra à cette guerre des royaumes où tous les coups sont permis ?
Samden a reçu de Mère Nature une couronne de lauriers et le devoir de gouverner Sajar, l'un des royaumes de Pärm où règnent harmonieusement le vivant végétal et le savoir en médecine. Sur l'autre rive de la Mer Mère, le roi Gabril gouverne Saad, un territoire à son image : royal et somptueux. Gabril peut aussi compter sur la pluie, denrée maîtresse de Pärm, qui ne tombe que sur ses terres. Mais le monarque s'ennuie et rêve secrètement de terres à conquérir et de guerres à mener. Bientôt, dans chaque royaume, une tragédie frappe. Lors de la Cérémonie de la Récolte des Bourgeons, les fleurs géantes de Sajar s'ouvrent et révèlent la mort des nouveaux-nés. De même, lors de la Cérémonie d'Ouverture d'Écrins à Saad, les coffrets renferment de jeunes cadavres. Gabril voit là une occasion de partir en guerre contre le royaume à l'abandon de Sewda, alors que Samden se lance dans l'inconnu en traversant la Mer Mère, abandonnant malgré lui son peuple aux ravages de l'épidémie. Il navigue au-delà de l'Horizon, selon la mystérieuse formule que lui a léguée sa mère " Par-delà la rumeur, plus loin que les on-dit... ", cherchant à ses risques et périls comment éradiquer ce nouveau virus...


Avant toute chose, je tiens à remercier la maison d'édition Scrineo de m'avoir donné l'opportunité de découvrir ce roman via la plateforme NetGalley.

Je dois l'avouer d'emblée : ma lecture de Pärm ne s'est pas faite d'un trait. La première partie du roman m'a accompagnée pendant trois bonnes semaines (ce qui est bien trop long à mon goût et quelque peu frustrant). Non pas faute d'intérêt, mais par inadéquation d'humeur. Ce n'était tout simplement pas le bon moment pour ce type de lecture : exigeante, foisonnante, réclamant une vraie présence à soi... et à l'œuvre.
Néanmoins, après une petite pause, j'ai entamé la seconde partie et tout s'est accéléré. En moins d'une semaine, j'avais tourné la dernière page. Quelque chose s'était débloqué.

Ce qui frappe avant tout dans ce roman, c'est la richesse de l'univers que Rawia Arroum tisse patiemment. Toutefois, cette densité a un prix : il faut s'accrocher. Ce n'est pas un roman qui se laisse apprivoiser facilement. C'est un livre qui nécessite une lecture attentive.

Le style de l'autrice suit la même logique : il est travaillé, parfois lyrique, souvent introspectif. Elle ne cède jamais à la facilité. Cela donne un texte à la fois riche et élégant, mais qui demande une réelle implication de la part du lecteur.

L'intrigue de Pärm ne se livre pas sur un plateau : elle se dévoile par strates, comme un palimpseste qu'on lirait à la lueur d'une lampe vacillante. L'histoire semble d'abord floue, presque insaisissable, tant elle s'inscrit dans un monde aux règles singulières, dont le fonctionnement ne nous est pas immédiatement offert. Il faut du temps pour assembler les pièces, pour comprendre les enjeux, les forces en présence, les conflits sous-jacents. Cependant, ce flou initial est aussi ce qui rend la progression fascinante : on avance comme en exploration, entre révélations partielles et ellipses volontaires, avec la sensation que chaque chapitre est un pas vers une vérité qui refuse de se laisser dompter trop vite.  L'intrigue joue donc moins la carte du suspense classique que celle de la construction patiente d'un monde et de ses fêlures.

Les personnages de Pärm ne sont pas de ceux qu'on cerne d'un seul regard. Ils sont ambigus, souvent tiraillés. On sent que Rawia Arroum leur a insufflé une profondeur intérieure - une forme de trouble aussi parfois - qui les rend à la fois humains et insaisissables. Ils ne sont ni tout à fait héroïques, ni franchement condamnables. Ils évoluent dans une zone grise où les choix ne sont jamais simples, où les motivations restent en partie opaques. Ce sont des figures qui déroutent autant qu'elles fascinent, et dont l'évolution, bien que subtile, marque véritablement la seconde partie du roman. On finit par s'attacher à eux non pas parce qu'ils nous ressemblent, mais parce qu'ils portent en eux une tension universelle : celle de vouloir comprendre leur monde et d'y trouver une place.

En résumé, Pärm est un roman qu'il faut apprivoiser, accepter de lire lentement, avec attention, en se laissant happer par sa complexité.
Ce roman ne plaira pas à tout le monde, mais il saura ravir celles et ceux en quête d'un univers original, profond et d'une écriture exigeante.

samedi 31 mai 2025

Pierre-Paul Renders, Denis Lapière et Adrián Huelva - U4 : Khronos

 

 Auteurs : Pierre-Paul Renders et Denis Lapière
Dessinateur : Adrián Huelva
Éditeur : Dupuis
Parution : 7 janvier 2022
Pages : 144
EAN-13 : 979-1034737765


Jules, Koridwen, Yannis et Stéphane sont enfin réunis à Paris. Mais pas en tant qu'amis, puisque Steph tient en joue Kori et Jules avec son arme... Une situation que les militaires, traquant les ados ayant survécu à la pandémie U4, vont vite aplanir en incendiant les lieux où le quatuor s'était dissimulé ! Découvrant qu'ils sont tous fans du jeu « Warriors of Time » (WOT) et tous convoqués par le maître du jeu Khronos, Jules, Koridwen, Yannis et Stéphane comprennent qu'ils doivent unir leurs forces. Parviendront-ils à remonter le temps, afin d'empêcher l'apocalypse qui a dévasté la planète ? Ou bien Kronos leur réserve-t-il quelques (mauvaises) surprises ? Avoir la même passion pour un jeu en ligne ne signifie pas avoir les mêmes croyances ni la même vision de l'avenir...



Après avoir vécu quatre effondrements (Stéphane, Koridwen, Yannis et Jules), U4 : Khronos s'annonçait comme la clef de voûte, le tome-miroir censé réconcilier les points de vue et refermer les parenthèses laissées ouvertes. Toutefois, ce n'est pas exactement ce que j'y ai trouvé.

On entre dans cette lecture avec cette idée tenace : comprendre enfin ce qu'était U4, ce que signifiait réellement le compte à rebours de Khronos. En un sens, on obtient des fragments de réponses, des révélations en biais, mais jamais la ligne droite, la lumière pleine. Ce choix me questionne. Ce flou m'a beaucoup frustrée. Ce volume embrasse l'ellipse, le paradoxe, la déchirure temporelle, au risque de perdre en densité ce qu'il gagne en mystère.
La promesse de clore l'aventure se heurte à une fin qui ne tranche pas, ne résout pas. Elle semble, au contraire, relancer le doute comme une fin en soi.
Khronos, serait-il un reflet imparfait des quatre premiers opus ? Un prisme où leurs récits se diffractent. Une œuvre qui interroge la narration elle-même : peut-on vraiment raconter la fin d'un monde ? Peut-on figer la vérité quand tout vacille ?
Si l'intention est audacieuse, elle laisse une part du lecteur sur le seuil, les bras pleins de questions. C'est sans doute cela qui m'a laissé une impression de manque. Je voulais comprendre. J'espérais, sinon une réponse, du moins une sensation de clôture. Or, le dernier mot est un point d'interrogation.

La série U4 s'achève non pas dans la clarté, mais dans l'incertitude. Cela fait que je ne sais que penser de la série dans sa globalité. L'univers est fort et la proposition originale. Mais cette fin, ou plutôt ce refus de fin, me laisse trop dubitative. Ce sentiment d'inachèvement fragilise à mes yeux la force du projet.
U4 reste une œuvre intéressante malgré mon incertitude. Peut-être est-ce cela le vrai choc de cette lecture : rester suspendue, là où j'attendais une dernière vérité.