samedi 20 septembre 2025

Charlotte Brontë, Emily Brontë et Anne Brontë - Jane Eyre / Les Hauts de Hurle-Vent / Agnès Grey

 

Auteurs : Charlotte Brontë, Emily Brontë et Anne Brontë
Editeur : Lgf Le Livre de Poche
Parution : 1er octobre 1997
Pages : 1 088
EAN-13 : 978-2253132387



Cette édition comprend les trois romans principaux des trois sœurs Brontë ainsi qu'une biographie illustrée. Sylvère Monod, spécialiste de la littérature anglaise du XIXe siècle, s'attache à faire ressortir l'influence du milieu qui devait marquer profondément la sensibilité des trois romancières.

Un père taciturne et fantasque, une mère évanescente et rêveuse, tôt disparue, une race imaginative, véhémente et passionnée : tels furent les dons du Destin pour les trois sœurs qui allaient devenir, comme le dit Virginia Woolf, " les femmes les plus attirantes du roman anglais ".
Elles étaient également douées pour tous les arts. Elles aspiraient ensemble, dès l'enfance, à donner une forme à leurs songes. Elles vécurent unies jusqu'à la mort, concentrées sur elles-mêmes comme un groupe d'exilés, dans un presbytère de campagne perdu sur la lande du Yorkshire.
Si, des trois sœurs Brontë, c'est Emily qui possède au plus haut point l'art de donner la vie aux mots, l'identité de leur triple génie se révèle par cette violence à voix douce qui est le ton même de la tragédie. Comme les Parques ou les Charites, les Brontë sont indissociables. C'est ainsi qu'il faut les découvrir ou les relire.
D'où la justification de ce volume.




🪶Jane Eyre🪶

Pour la lecture du mois d’août du bookclub de Chez Cha Cheshire, nous avons plongé dans un classique très connu. J’avais une vague idée de l’histoire, comme souvent avec les romans qu’on n’a pas lus mais qui circulent partout. Pourtant, la lecture a été bien plus déroutante que prévu.
Honnêtement, le début m’a paru interminable. L’enfance de Jane, marquée par la violence et le rejet, s’étire sur plusieurs chapitres avec un certain statisme. L’ambiance est pesante, presque étouffante. Ce n’est pas tant que ce soit mal écrit – l’autrice maîtrise parfaitement l’atmosphère – mais cela traîne. Il m’a fallu de la persévérance pour dépasser les premières dizaines de pages.

Heureusement, une fois arrivée à Thornfield, tout devient plus dense. Jane, jeune femme indépendante et cultivée, prend de l’ampleur. Ce n’est pas une héroïne classique : on insiste d’ailleurs régulièrement sur le fait qu’elle n’est pas jolie (peut-être un peu trop à mon goût). Une manière de la détacher des archétypes romantiques. Elle ne séduit pas, elle existe. Et c’est déjà beaucoup.

Ce qui rend Jane intéressante, c’est qu’elle est maîtresse de son histoire. Elle la raconte, elle choisit quoi dire, comment le dire. Elle ne cherche pas à susciter l’empathie facile. Elle veut être prise au sérieux. Elle incarne, à sa manière, une forme d’émancipation rare pour son époque. Elle affronte seule la pauvreté, la solitude, la marginalisation. Elle prend des décisions difficiles, parfois radicales, toujours cohérentes avec ce qu’elle est. Mais en même temps, elle n’est pas totalement détachée. Elle cherche le regard de l’autre, souvent celui d’un homme, comme un point d’appui ou un miroir. Ce paradoxe – vouloir rester libre tout en cherchant une forme de reconnaissance – la rend crédible (et parfois un peu agaçante). On voudrait qu’elle s’affirme plus vite, qu’elle dise non plus fort, qu’elle parte plus tôt. Et pourtant, sa lenteur à réagir est aussi ce qui la rend humaine.

Quant à M. Rochester… difficile de ne pas le voir comme un immense nid à red flags. Il ment, il manipule, il teste Jane en permanence. Il crée une tension malsaine, même si c’est sans doute ce qui rend leur relation aussi prenante. Il n’est jamais tout à fait odieux, mais il est profondément problématique. Ce qui sauve l’ensemble, c’est que Jane finit par lui échapper. Elle refuse de devenir sa dépendante, elle s’en va. Elle ne revient que lorsque les conditions sont différentes, lorsqu’elle peut le retrouver sans s’effacer. C’est un des rares romans du XIXe siècle où la femme ne sacrifie pas tout pour l’amour. Elle le choisit, mais à ses conditions.

Ce qui traverse tout le roman, c’est la tension entre l’amour et la liberté. Jane veut les deux, mais ne les confond pas. Elle ne cherche pas la fusion. Elle veut pouvoir partir si elle en a besoin. C’est cette possibilité qu’elle préserve, jusqu’au bout. Même quand elle revient, ce n’est pas une reddition. C’est un choix.

Je ne dirais pas que j’ai adoré le roman. Il y a des longueurs, des passages pesants (les sermons de St. John, notamment) et certains aspects m’ont franchement agacée. Mais Jane Eyre est une figure marquante. Pas parfaite, pas lisse, mais solide. C’est un livre qui mérite d’être lu pour ce qu’il dit sur la voix d’une femme dans un monde qui essaie constamment de la faire taire. Elle ne crie jamais, mais elle insiste. Et ça, ça reste.

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